Chat forestier

Le soleil de juillet décline sur cette prairie des côteaux du Guiers fraîchement fauchée. Dans l’herbe rase entre les andains, un gros chat jusqu’alors immobile vient de bondir sur sa proie. Après de brefs regards de part et d’autre il s’éloigne en direction de la forêt avec un campagnol dans la gueule. Sa queue longue et épaisse terminée d’un manchon noir et barrée de quelques anneaux bien visibles, sans rayure dorsale, laisse penser à un chat forestier : le chat sauvage.

Distribution

Autrefois présent dans toute l’Europe, l’Asie mineure et le Caucase. Son aire de répartition s’est largement réduite au cours du 19ème siècle du fait du morcellement des milieux forestiers, de la chasse et du piégeage. Le quart nord-est de la France abrite actuellement une des plus importantes populations européenne, avec le piémont pyréneen, l’Espagne, l’Italie, l’Europe de l’Est et les Balkans. Depuis l’après-guerre, l’augmentation des surfaces forestières et l’arrêt des destructions suite à la protection de l’espèce, on assiste à un lent processus de recolonisation en France. Dans notre région l’espèce occupe le Jura, le Bugey et les secteurs proches du Nord-Isère (Isle Crémieu). La première mention de l’espèce en Chartreuse en 2006 dans les gorges de Crossey constituait alors la limite sud est de la répartition connue.

Ecologie

En dehors des prairies où il chasse, il est extrêmement discret et facilement confondu avec un chat domestique. Il est en moyenne un un peu plus grand que ce dernier, avec une queue plus longue, une raie dorsale ne se prolongeant pas sur la queue, des flancs fauves aux rayures peu marquées (sauf chez les jeunes), une queue épaisse terminé d’un manchon noir et rayée de quelques gros anneaux bien visibles. L' »hybridation » avec le chat domestique étant possible, les analyses génétiques permettent en cas de doute sur les caractères physiques de distinguer les deux espèces.
Contrairement aux chats domestiques et au chats harets (chats vivant à l’état sauvage), le chat forestier se nourrit à plus de 80 % de rongeurs (principalement des campagnols). Il choisit ses proies en fonction de leur abondance relative : selon les années, il chasse donc plutôt en milieux ouverts (prairies de fauche et pâtures) pour le campagnol terrestre, ou en forêt pour le campagnol roussâtre. Solitaire, les contacts entre individus se limitent à la reproduction, le territoire d’un mâle est de l’ordre de 5 km2 et peut recouper le territoire de plusieurs femelles (de l’ordre de 2km2). Il aurait du mal à subsister en hiver au dessus de 1000 m d’altitude du fait du manteau neigeux, mais sa présence dans les Préalpes étant récente, beaucoup reste à découvrir sur son mode de vie en montagne.

Conservation

Son retour en Chartreuse témoigne de la continuité du couvert forestier et d’un maillage suffisant de haies et de prairies préservées de l’urbanisation. Les chats errants ou laissés à l’abandon peuvent constituer une menace du fait des risques d' »hybridation », bien que ces individus soient assez rares dans les populations étudiées.

STATUT : espèce protégée, quasi menacée (sur liste rouge régionale)

> ACTION PARC : En 2009 une série de prospections avait été réalisée à l’initiative du Parc par la LPO mais n’avait pas pu montrer la présence de l’espèce. En 2017 un travail de suivi à partir de pièges photographiques a été mené par un agent du Parc avec l’aide d’un réseau d’observateurs regroupant agents de l’ONF et bénévoles, en lien étroit avec l’ONCFS notamment pour les aspects d’indentification et de génétique. Les données collectées ont permis de montrer le retour du chat forestier et sa reproduction sur l’ensemble du territoire, jusqu’à 1500 m d’altitude au moins en été.

> EN SAVOIR PLUS, téléchargez le Bilan du suivi effectué en 2017 et 2018 « Le Chat forestier (Felis silvestris) en Chartreuse : un retour récent ? » :
Synthèse complète

© crédits textes : Jérôme Bailly crédit photo : Joël Brunet