Lynx boreal

Lynx lynx

Dans la neige fraîche, la piste constituée de larges empreintes arrondies coupe le talus puis suit le chemin forestier sur une cinquantaine de mètres, avant de s’enfoncer à nouveau entre les troncs. Au passage d’une ornière où la neige fondue se mélange à la boue, on distingue nettement les pelotes digitales dissymétriques et l’absence de griffes. Plus loin, le lynx a marché sur le tronc couché d’un vieux sapin.

Distribution

Autrefois présent dans toutes les régions boisées d’Europe. A l’exception des pays scandinaves et d’Europe Centrale, le lynx n’occupait plus que les régions montagneuses au 17ème siècle. Au début du 20ème siècle, il avait totalement disparu des Alpes.

A partir de 1970, plusieurs programmes de réintroduction sont mis en œuvre en Europe et notamment dans le Jura Suisse, puis dans les Vosges. Depuis, il a recolonisé progressivement certains massifs forestiers de l’Est de la France et des Préalpes. Mais à l’exception du Jura, la croissance de la population semble faible, la population vosgienne ayant même atteint un seuil critique. En 1990, la première observation d’un lynx en Chartreuse constituait quasiment la limite sud de sa répartition connue, c’est encore le cas aujourd’hui.

Ecologie

A peine moins haut (60 cm au garrot) et lourd (environ 20 kg) qu’un chevreuil, sa proie principale, ce prédateur se nourrit essentiellement d’ongulés sauvages, le chamois arrivant en seconde position. Les petites proies (renard, chat forestier, lièvre…) sont moins fréquentes. La prédation sur les troupeaux de moutons reste très localisée (Jura) et limitée à quelques individus profitant de conditions favorables (pâturages enclavés en forêt). Il n’est pas strictement inféodé aux forêts de montagne et peut donc également occuper les forêts de l’étage collinéen.

En Chartreuse, le faible nombre d’indices de présence constatés certaines années, peut laisser penser que l’espèce n’est présente que de manière sporadique car en marge de son aire de présence régulière.

Le suivi par caméras automatiques réalisé depuis 2017 a permis de montrer la présence d’au maximum 4 individus au cours d’une même année (dont une femelle). Bien que des indices concordants existent pour l’année 2018, une seule preuve de reproduction a pu être prouvée en 2003 (Michallet, ONCFS, 2003) dans le sud-ouest du massif. Au début des années 2000 plusieurs observations établissent des cas de reproduction sur le Mont du Chat (Derain, comm. pers.)

La plupart des individus observés en Chartreuse sont également contactés dans le Bugey et sur le Mont du Chat, effectuant parfois des allers-retours fréquents.

Les échanges de population avec le massif jurassien ont été démontré une première fois en 2013 avec la photographie à Proveysieux d’un individu déjà identifié dans le Jura (Michallet, Briaudet, ONCFS, 2013). Le Mont du Chat, La montagne de l’Épine et  le chaînon du Ratz constituent en effet un prolongement géologique du Bugey et du Jura

La majorité des observations se situent donc logiquement sur le sud-ouest du massif, ainsi qu’aux alentours de l’Épine. Bien qu’il puisse être présent également sur le versant Est, aucune preuve de présence n’y a été collectée ces dernières années.

Certains individus ont été contactés très régulièrement entre 2017 et 2020, d’autres au contraire ont  assez rapidement « disparus » après quelques mois, laissant supposer des cas de mortalité (pathologies, collisions, braconnage : les causes de mortalité peuvent être diverses).

Avec un territoire de l’ordre de plus de 200 km² pour les mâles, recoupant parfois celui de plusieurs femelles (de l’ordre de 125 km²), l’espèce reste discrète à l’échelle du massif, qui accueille potentiellement moins d’une dizaine d’individus.

Conservation

Sa présence est indicatrice de la continuité et de la qualité du couvert forestier en connexion avec le massif jurassien, ainsi que de populations d’ongulés sauvages en bonne santé.

La proportion d’animaux en provenance du Jura au sein de la population connue en Chartreuse ainsi que l’absence de femelle et de preuves de reproduction régulières dans le massif interroge au plan national sur la réelle pérennité de l’espèce en Chartreuse et dans les massifs extérieurs au Jura.

ACTION PARC :

Le Parc participe depuis 2002 aux prospections menées dans le cadre du groupe loup-lynx de l’OFB qui regroupe des correspondants ayant suivi une formation (agents de l’ONF, bénévoles, chasseurs).

Entre 2017 et 2020, le suivi par caméras automatiques mené par le Parc et les membres du réseau a permis de mettre en évidence la présence de 7 individus différents sur le versant ouest du massif mais a aussi démontré la fragilité de l’espèce (absence de preuve de reproduction, fréquents allers-retours dans les autres massif, « disparitions » de certains individus).

Fin 2020 un seul individu était contacté en Chartreuse.

Retrouvez la carte du suivi photographiques du Lynx sur ce lien